- Kennie, dit-elle ; tu es libre de monter n'importe quel cheval du ranch ; pourquoi tiens-tu tellement à avoir ce poulain ?
- Oh ! Mère ! ce n'est pas seulement pour le monter. Je veux un poulain pour que nous soyons amis. Je veux qu'il soit tout à moi, tout à moi, Mère ....
Voilà tout le désir de ce petit rêveur de 10 ans, lorsqu'il rentre du Collège au ranch Goose Bar, pour ses vacances d'été. Mais quand ses parents cèdent à son désir afin de lui donner le sens des responsabilités et lui remettre les pieds dans une réalité qu'il a du mal à appréhender, il choisit la pouliche la plus sauvage du ranch, qui lorsqu'elle est capturée se blesse grièvement dans les barbelés afin de s'enfuir.Désormais les jours de l'animal sont en danger tandis que Ken, éperdu d'amour, va tout donner pour la sauver.
Au delà d'une histoire d'amour entre un enfant et son cheval - aucunement niaise par ailleurs comme le sont quelquefois certaines histoires destinées aux enfants- Mon amie Flicka prend vie dans un univers rude et âpre : la vie des éleveurs de chevaux du Wyoming, un endroit encore peu habité, dur et terriblement sauvage.
[Comme dans Le poulain rouge de Steinbeck]
Une dureté symbolisée par le père de Ken, qui élève ses deux garçons de façon presque militaire, afin de les préparer à la vie et aux valeurs qui lui sont propres, un homme passionné et travailleur, qui force l'admiration de ses fils et le respect de ses employés .... une rudesse tempérée par Nell la mère qui représente toute la douceux nécessaire aux gens de l'Ouest.
C'est aussi un formidable roman sur la découverte de l'amour et de la vie mais aussi de la mort par les yeux d'un petit garçon qui, pour un cheval, va être obligé de laisser ses rêves de côté et affronter la réalité.
Les relations entre les personnages sont très fortes, ainsi les liens chaotiques entre Ken et Rob son père, le premier craignant le second tandis que le second ne sait pas comment se faire un ami du premier, sont un élément déterminant du récit, et tempérés par Nell qui fait le lien entre deux personnalités qui se ressemblent au final tant qu'elles s'en opposent.
Des personnages tellement réels et attachants qu'on a vite l'impression de faire partie de la famille, de leur vie. C'est un roman très naturel, écrit par une auteure qui a vécu de la même manière et donc transmet sa propre expérience au travers son récit.
Sans oublier le rôle des animaux qui jalonnent le quotidien de ces éleveurs et surtout les chevaux ... ces fabuleux chevaux libres et élevés en pleine montagne sous la garde d'un étalon Banner, dont chacun a son histoire, comme Rocket, la fameuse jument "dingo" la mère de Flicka ... qui donnera naissance aussi à toute une lignée de chevaux sauvages et indomptables, issus du fameux l'Albinos un cheval légendaire.
S'il est un livre que j'emporterais sur une île déserte, c'est bien celui ci, accompagné de ses deux tomes suivants, parce que je pense que c'est l'un des plus beaux livres écrits sur le cheval pour la jeunesse.
Extrait
Le poulain de Rocket - un yearling, une pouliche - la sienne à lui. Il n'avait pas eu à la choisir : elle s'était donnée. Elle lui appartenait parce que d'un regard elle lui avait demandé secours ; elle lui appartenait à cause de sa beauté sauvage, de sa vitesse et parce que, à sa vue, à sa seule pensée, il sentait faillir son coeur.
Une petite remarque pour achever ce billet ... sur la postface qui conclue le roman, dont j'ai retenu ces termes complètement désuets "Lecture saine pour des garçons jeunes et pour ce qui reste , en chacun de nous, de jeunesse."
Bon pour la jeunesse je ne dis rien mais non Monsieur André Maurois, Mon amie Flicka, n'en déplaise à votre jugement, peut être aussi apprécié par les jeunes (et moins jeunes) filles !