dimanche 19 mai 2013

Elle qui chevauche les tempêtes de Lisa Tuttle et George RR Martin


Autrefois, des navigateurs dans de grands vaisseaux aux ailes d'argent firent naufrage sur un monde d'océan infini et de tempêtes furieuses, un monde où la terre s'éparpille en des milliers d'îlots rocheux .... Contraints de s'adapter, ils transformèrent les voiles de leurs machines volantes en ailes flexibles et solides afin de pouvoir communiquer d'îles en îles : ainsi naquirent les aériens...

Depuis son île, Mariss, une rampante fille de pêcheur n'a qu'un rêve : celui de devenir comme ces fabuleux messagers volants .... une aérienne.
Son voeu ne tarde pas à s'exaucer lorsqu'elle est adoptée par une famille sans enfants dont le père lui apprend à voler ... Hélas quelques années plus tard elle doit rendre ses ailes, selon la tradition qui les offre en droit au fils du couple (venu contre toute attente) à  sa majorité : Coll, qui, lui pourtant rêve d'être barbe.
Mariss ne peut se résoudre à une telle injustice .... voler est sa vie, elle va tout faire pour garder ce droit, même en allant contre traditions et conseils d'anciens...

"Mariss chevauchait la tempête à trois mètres au-dessus de l'eau, domptant les vents de ses larges ailes en métal tissé. Elle volait, féroce, intrépide, ravie par le péril et le contact des embruns, indifférente au froid. Le ciel était d'un menaçant bleu de cobalt, les vents montaient, et elle avait des ailes ; cela lui suffisait. Si elle mourrait à l'instant, elle mourrait heureuse, en vol.
Elle volait mieux qu'elle ne l'avait jamais fait, se ployant et planant entre les flux aériens, sans y penser, captant à chaque fois les courants ascendants ou descendants qui la porteraient plus loin ou plus vite."

En traversant trois périodes de la vie de Mariss, on vit à travers ses yeux tout son combat pour faire changer les choses sur cette planète océane dont les traditions sont ancrées depuis des millénaires : les aériens restent des aériens et les rampants des rampants ... Un peu comme au Moyen Age où changer de caste était absolument impossible. Même si les choses évoluent, grâce à elle, la loi reste difficile à contourner et si elle s'est assouplie quelque peu, les rampants désormais autorisés à voler,s 'ils font leurs preuves qu'ils méritent des ailes, restent en butte au dédain et au rejet des "vrais" aériens.
Ainsi l'on reste dans un monde où la tradition a plus de poids que le mérite ....

Ecrit d'une plume poétique et agréable, ce récit m'a emportée immédiatement, d'ailleurs moins par l'histoire en elle-même (même si je l'ai dévorée pages par pages) que par les sensations de vol fabuleusement décrites par les deux auteurs ... Il subsiste quelque chose de magique dans ce roman : qui n'a jamais rêvé de voler au travers les vents ? de survoler les mers ? de ressentir cette absolue liberté ? En tout cas moi, oui ! 
Or Tuttle et Martin décrivent ces moments de vol avec une sorte d'extase complètement communicative, qui transporte !
On reconnait d'ailleurs bien la patte de Martin dans les côtés un peu rudes du récit, probablement adoucis par celle de Tuttle (dont je ne connais pas encore les écrits mais que j'ai fort hâte de découvrir), si Martin a l'habitude de ne faire aucun cadeau à ses personnages, ceux-ci semblent avoir bénéficié d'une sorte de clémence, induite par la plume de Tuttle. 
Néanmoins ce n'est pas pour autant que le roman se transforme en "tout est bien qui finit bien", Mariss aura à lutter et à renoncer à bien plus qu'on pourrait le penser au préalable et même lorsque les choses s'arrangent, ce n'est pas tout à fait du 100% "fin heureuse ou victoire assurée", Martin veille là -dessus.
Du coup le mélange des deux talents donne un récit très réel, très attachant et au final fort beau.

En tout cas j'ai vraiment vraiment adoré, c'est même un coup de coeur plein de ressentis émouvants. Du coup j'ai trouvé beaucoup de plaisir à rédiger ce billet.
Une mention aussi spéciale à la couverture que vraiment je trouve sublime ^^

Extrait
Les souvenirs venaient d'eux-mêmes, pourtant : le monde étalé au-dessous d'elle, la joie de porter des ailes, le frisson de courir en tête de la tempête, la myriade de couleurs au ciel, la magnifique solitude de l'altitude. 
[...] Un jour, elle avait rencontré un courant ascendant qui l'avait menée à mi-chemin de l'infini, là-haut vers les royaumes où s'étaient mus les navigateurs stellaires, où la mer elle-même s'effaçait au-dessous et où ne volaient plus que les spectres des vents, étranges et éthérés. Elle se souviendrait à jamais de ce jour, à jamais.

Ailleurs

16 commentaires:

  1. Beaucoup aimé aussi, encore plus pour le contexte, à mon goût. Malgré les fortes divisions sociales, les gens sont rarement jugés pour ce qu'ils font et, la plupart du temps, peuvent être ce qu'ils veulent.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui c'est vrai, quoiqu'ils peuvent l'être au prix de beaucoup de souffrance, je pense notamment à Val.

      Supprimer
  2. Je ne m'étais donc pas trompée :D C'est un très chouette livre. Je ne me souviens plus si je l'ai mis en coup de cœur, mais vu le souvenir que j'en garde, je le mets en coup de cœur à titre posthume.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Coup de coeur à titre posthume, ça c'est fort, xd
      Oui tu ne t'étais pas trompée ^^

      Supprimer
  3. Martin et Tuttle, ça fait un beau duo, il ne peut en sortir que du bon !
    Comme j'ai dans l'idée de lire tout ce qu'à écrit Martin (en français en tout cas), ce roman figure dans mes objectifs, pas de raisons que je sois déçu. ;)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'espère que tu ne le seras pas ^^
      Je suis d'accord avec toi pour le beau duo, me reste à lire Tuttle maintenant.

      Supprimer
  4. Faut que je le lise avant 5 ans donc... ;)

    RépondreSupprimer
  5. Je suis partagée, si j'adore l'écriture de Tuttle, j'ai eu du mal avec (la traduction de) Martin. Leur différence est tellement grande à mes yeux, que ce soit pour mener l'intrigue ou amener les élements. Ceci dit, peut-être qu'il se bonifie aux côté de Tuttle (héhé)
    Bon alors, la rédaction de cette chronique s'est-elle bien passée ? as-tu pris du "loisir" à l'écrire ? ;)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai que tu n'es pas très fan de Martin ^^ Je ne peux pas dire s'il se bonifie au contact de Tuttle, ne connaissant justement pas l'écriture de cette dernière
      Eh bien oui ma chronique s'est bien passée, j'ai pris plaisir, vraiment, du coup je recommence à penser à mon blog en termes positifs :)

      Supprimer
  6. Je ne sais pas si ça va te rassurer si je te dis qu'en général Lisa Tuttle n'épargne pas non plus ses personnages xD
    Faudrait que je le relise celui-là un jour, j'en garde de bonnes impressions mais la fin m'avait frustrée (ne me demande pas pourquoi pas contre), faudrait que je passe au dessus de ce détail quand même ^^.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ah non cela ne me rassure pas, xd, alors qui a eu le pouvoir sur l'autre s'ils sont tous les deux pareils ? mdr
      La fin rentre tout à fait dans le fait que tout justement n'est pas si rose dans ce roman.

      Supprimer
    2. Bah c'est ptêtre comme en maths, - et - font + :D

      Supprimer
  7. Un livre qui m'a tout de suite attiré l'œil et que j'ai beaucoup cherché. Je l'ai depuis quelques jours seulement, mais j'ai hâte de le commencer !
    Déjà que le thème me plaisait, et avec toutes ces chroniques positives, je vais avoir du mal à attendre je crains...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Alors bonne lecture et merci de ton passage ici ^^

      Supprimer