samedi 8 juin 2013

Lasser un Privé sur le Nil de Sylvie Miller et Philippe Ward

"Il y a du polar mais pas que ... Un zeste d'Egypte, un doigt de whisky, de dieux, des policiers, des méchants, Isis et un chat. Tous les ingrédients pour l'aventure. Egyptamicalement" Philippe Ward

Une fois n'est pas coutume, je cite la dédicace qui accompagne mon livre acheté aux Imaginales 2013 , tant elle correspond à ce recueil d'enquêtes menées par un détective au préalable pas si doué que cela et pourtant embauché sans cesse par les Dieux .... Ces Dieux qui vivent avec les humains dans une Egypte des années 32, qui conduisent des voitures de luxe et se font des crasses les uns les autres ... sans compter qu'ils se servent outrageusement des humains, voire même les suppriment d'une simple pichenette ....

"Je n'aimais pas les dieux et j'avais de bonnes raisons. Il existait un curieux rapport entre eux et nous, les humains. Nous les vénérions, ils nous protégeaient. Du moins en théorie. En pratique, ils se bornaient à vivre entre eux, dans leur milieu pourri d'intrigues, de jalousies et de rivalités. Et du fait de ces petits jeux de pouvoir, nous nous retrouvions, le plus souvent, pris entre le marteau et l'enclume."

Philippe Lasser qui pourtant juge que "où que j'aille, il se trouvait toujours une divinité pour venir m'empoisonner l'existence", se retrouve tour à tour engagé 
- par Isis afin de retrouver le manuscrit de Thot disparu à quatre jours de la fête d'Opet; festivité ô combien importante qui réaffirme la nature divine du souverain (en l'occurrence Ramsès XXVII).
- par Sekmet qui attend de lui qu'il remette la main sur une de ses chattes sacrées, disparue, avant le concours annuel des plus beaux chats du monde.
- par Isis à nouveau afin de retrouver le pénis de son mari Osiris (lequel fut découpé en mille morceaux par son charmant frère Seth et recomposé par Isis sauf le sexe gardé précieusement dans une jarre afin de ne l'utiliser qu'à bon escient .. "J'ai dissimulé le sexe d'Osiris pour que mon époux ne courre par le guilledou. Je le sors uniquement lorsqu'une petite envie me prend et ensuite je le recache.")
- par Khnoum parce que le Nil a cessé de couler en Egypte, retenu par les Dieux nubiens contre la libération du fils de leur pharaon, accusé d'avoir voulu empoisonner Ramsès.

Et au cours de ses enquêtes, le voilà confronté à un chef policier un brin mafieux qui a décidé de le faire coffrer une bonne fois pour toute, au Dieu Seth, cruel et revanchard qui se sert de lui comme un punching ball tout en parlant avec un accent italien, se faisant à l'occasion aider par un chat Ouabou (en réalité un Dieu transformé, pour le fun) qui réinvente le conte du Chat Botté à sa façon  et par Fazimel qui conduit une coccinelle rose comme une formule 1 ... Le tout ponctué d'humour et de dérision et d'absurdité : les désidératas des Dieux sont vraiment à mille lieues de ceux des humains et leurs préoccupations encore plus lointaines, ainsi les dénouements ne manquent pas de faire sourire par le côté complètement décalé de l'importance des résolutions pour ces Dieux : en gros Jean Philippe Lasser a souvent la sensation de se faire complètement entuber.
Ce personnage là, tout détective qu'il soit, a surtout en réalité envie de se faire du fric et de rester tranquillement assis à siroter son seize ans d'âge ..... et s'il accepte les missions qui lui sont confiées c'est en grande partie parce que l'on peut difficilement refuser quelque chose à un Dieu.  
Si l'on sent que Sylvie Miller et Philippe Ward ressentent une pleine affection pour leur héros, ils n'hésitent pas à le mettre gentiment en boite à la première occasion, ce qui le rend extrêmement sympathique ....

Et si on y rajoute la mythologie des Dieux revisitée par les deux auteurs, une fantasy qui se mêle au polar, une Gaule uchronique des années 30, on a là un roman qui se lit délicieusement et avec délectation. Le procédé narratif est strictement le même à toutes les nouvelles enquêtes : un bar dans lequel Jean Philippe Lasser sirote son whisky, un silence qui se fait parmi les pachas, annonçant l'entrée d'un dieu et tout recommence ... une enquête avec les mêmes éléments perturbateurs, donc le fameux Seth qui ne sait plus quoi inventer pour lui déglinguer la tête ... Après avoir pensé qu'il y avait un peu trop de similitudes entre ces éléments d'aventure, je me suis dit qu'en réalité ce procédé comme le modus operandi d'un serial killer était une note humoristique supplémentaire au contenu, du coup au lieu de me lasser il a achevé de mettre une touche plus qu'amusante à ces déboires de détective qu'on ne prend pas au sérieux (pas plus que lui d'ailleurs).
J'aurais d'ailleurs très envie d'entendre les auteurs s'exprimer sur ces "répétitions".

En bref, une très sympathique découverte que j'ai lu avec beaucoup de plaisir. J'ai très envie aussi de découvrir le second tome.

Ailleurs
Olya ; Lelf ...

4 commentaires:

  1. Beaucoup aimé aussi ce livre, un divertissement vraiment plaisant et bien documenté (et pour moi les répétitions font partie du jeu aussi, limite ça me manque dans la suite qui se compose d'une seule enquête xD).

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    1. Voilà tout à fait, cela fait partie du jeu de lecture, je ne vais pas tarder à acheter la suite en tout cas, j'ai vraiment aimé ^^

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  2. Je l'ai fini aussi (mais bon le billet traîne encore dans les brouillons). j'ai acheté le second tome là récemment(je n'ai pas réussi à voir Sylvie Miller et Philippe Ward à leur table de dédicace aux Imaginales :( ) je te rejoints : c'est léger, drôle et les clins d'oeil apportent une touche de sympathie supplémentaire pour Lasser :)

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    1. Ah j'ai hâte de lire ton billet alors, je trouve toujours très plaisant de lire chez les autres blogueurs les chroniques des livres que l'on a appréciés, cela donne la sensation de s'y replonger :)
      Ah dommage que tu n'aies pas pu avoir les deux auteurs, ils sont vraiment très sympathiques, à l'image de leur héros au final ^^

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