mardi 16 août 2011

Le chagrin du roi mort de Jean Claude Mourlevat

Petite Terre .. une île minuscule, enneigée et gouvernée par un roi pacifique qui vient de mourir ....
Son fils a été assassiné, il n'a aucun descendant ... enfin c'est ce que tout le monde croit ...
Car il existe un enfant Brisco ... confié à une famille après sa naissance, élevé comme leur fils avec leur propre enfant Aleksander .... et tout le monde ignore son origine en dehors d'une vieillie sorcière Brit.
Les deux enfants grandissent comme des frères jumeaux, attachés l'un à l'autre au point qu'ils sont inséparables, jusqu'au jour où celui qui a fomenté la mort du fils du roi, (en réalité le neveu du roi Guérold, banni après ses méfaits) fait enlever Brisco pour l'emmener loin des siens ... et alors la vérité se sait ...

Le roman de Mourlevat se sépare en deux parties : la première qui montre l'enfance d'Alek et Brisco puis la deuxième qui débute 8 ans plus tard, alors que les tentatives pour récupérer Brisco ont échoué, que la guerre pour conquérir le continent sous l'égide de Guérold venu reprendre le pouvoir sur Petite Terre, va faire des milliers de morts ....tandis qu'Aleksander rencontrera son grand amour, ainsi que lui avait prédit une femme ....

Il est des fois très difficile de déterminer si l'on a aimé ou non un livre .... Mourlevat est l'un des meilleurs auteurs de littérature jeunesse française, (il a écrit de petites perles pour enfants comme La Balafre ou l'Enfant Océan et s'est essayé avec succès à la littérature adolescente avec le Combat d'Hiver) et il signe là encore un roman fort bien écrit, bien construit, qui se lit sans heurts ....plein de poésie ....

"La nuit, dans sa beauté insidieuse et cruelle, entra en eux. Et tout se dérégla. Tantôt il semblait à Aleks que le ciel était le lustre de cristal d'un salon gigantesque et baroque, tantôt au contraire qu'il se vidait d'étoiles et devenait tout blanc. L'instant d'après, il resplendissait d'un violet profond. Tantôt le silence se refermait sur la plaine, si dense qu'ils n'auraient pas pu le rompre même en hurlant, tantôt la fanfare assourdissante d'un orchestre symphonique descendait du cosmos et se déversait sur eux."

"Ils se glissaient sous les couvertures et oubliaient les mots. les verbes devenaient des caresses, les adjectifs des baisers. En peu de temps, ils découvrirent l'un de l'autre toute la grammaire de leurs corps silencieux.
Et le vocabulaire.

Et l'orthographe.

Et la conjugaison."


Et pourtant .. j'ai eu la sensation sinon d'incohérences, de ruptures entre la première partie et la deuxième.
La première est pleine de promesse, on est dans une histoire de fantasy, avec un roi, une sorcière, une quête, il manque néanmoins une carte qui aurait parfaitement illustré les lieux, les deux enfants sont attachants et l'enlèvement parfaitement mis en place .... le mystère de la naissance de Brisco est relaté sous forme de conte, ce qui est intéressant. On assiste impuissant à l'échec de sa récupération tout en se posant des questions : pourquoi, alors que le Conseil savait que cet enfant était petit fils de roi, n'a dépêché personne pour le récupérer ?
A un moment où Guérolf ne devait pas s'attendre à ce qu'on parvienne jusque chez lui, il aurait été possible à quelques hommes armés d'intervenir relativement facilement ...
Non seuls le père des enfants, accompagné de la fameuse sorcière Brit et d'une sorte de nain grincheux, tenteront l'impossible et échoueront ... de façon tragique pour au moins l'un d'entre eux ...

On ne doute pas que c'était l'intention de l'auteur puisqu'il fallait que les deux enfants grandissent et soient en définitive séparés ... Certes ....
On imagine alors que la deuxième partie va nous permettre d'arriver au bout de cette quête, qu'il y aura fatalement réunion des deux enfants, devenus adultes, tout du moins retrouvailles ....

En fait le roman prend une tout autre tournure, dans une atmosphère de première guerre mondiale (les tranchées, les poux, la peur, les hommes terrés, les exécutions des soldats déserteurs pour faire un exemple, tout y est) avec un soupçon de campagne napoléonienne (le pays envahi glacé, les cosaques et la résistance défaite par le froid intense), Aleksander va rencontrer donc le grand amour et tout va graviter désormais autour de cela ...
Exit le frère, tout du moins en partie, il y aura retrouvailles certes, d'une façon qu'on devine d'avance mais aucun espoir de final à cette relation ... les deux enfants ont grandi, ne se reconnaissent qu'à peine, se séparent à nouveau .. sans rien essayer ...
Un peu frustrant ...

Du coup j'avoue avoir été relativement déçue et m'être un peu ennuyée durant la seconde partie. Cela partait vraiment bien, une ambiance féérique, un paysage enneigé, une amitié fabuleuse entre deux enfants, Mourlevat excelle pour conter des histoires d'enfants .... je l'ai trouvé moins touchant dans son histoire de jeunes adultes .. tout du moins dans le livre là, car sur Terrienne, la sauce avait parfaitement pris ....

J'ai trouvé regrettable qu'il fasse presque deux histoires en une ... que les promesses du début n'aboutissent pas ... que cette histoire de petit fils de roi caché, enlevé, retrouvé malgré tout, n'aille pas jusqu'au bout. Que l'histoire prenne une toute autre direction.
Et les errances finales d'Alek et Liz pour se retrouver et toujours se manquer, sont un peu agaçantes ...

Un avis donc mitigé pour ce roman, fort bien écrit certes mais qui manque de consistance à mes yeux .... Dommage ...
Cela dit un avis qui n'a pas l'air de faire l'unanimité si j'en crois les nombreuses critiques élogieuses que j'ai pu lire ; ce livre ne m'a visiblement pas convenu mais pour autant je n'inciterai surtout pas à sa non découverte ! Parce que cela reste un Mourlevat malgré tout ....

Ailleurs
Ici l'interview de l'auteur ; chez lily ; passiondeslivres .....




2 commentaires:

  1. Bonjour,

    Je travaille pour Virgin Megastore, et je souhaiterais te contacter par mail. Cependant, je ne trouve pas d'adresse sur ton site. Où puis-je t'écrire ?

    Merci

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  2. j'ai beaucoup aimé ce livre : "deux histoires en une ", cela ne m'a pas dérangé. On peut considérer que la première c'est l'enfance et la seconde l'entrée dans le monde adulte. Brisco est bien le petit fils du roi...mais l'auteur nous montre bien que "c'est du passé". ça fait de la peine certes.

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