Attention ne pas lire si vous n'avez pas encore découvert ce tome 5, spoiler oblige (et pas le choix).
Nous avions quitté Jasper et Ombe dans Le subtil parfum du souffre partant sur la moto d’Ombe, filant dans la nuit, enfin réunis …. Ces deux solitaires dans l’âme se sont trouvés et on peut espérer une belle histoire d’amitié entre eux …
On les retrouve au même instant … Jasper cramponné des deux bras autour de la taille de son amie … sa sœur telle qu’il l’a appelée … savourant ce moment magique …
Quand soudain ….
"L’obscurité.
L’obscurité et le silence.
Bip.
Je suis sur le dos, les bras en croix, le regard perdu dans les ténèbres. Je ne parviens pas à bouger. Je suis sur le dos et quelque chose m’écrase, de lourd, d’épais, de noir. Comme du goudron. J’ai du mal à respirer.
Bip."
Sur le coup je l’avoue, malgré la quatrième de couverture qui n'annonçait rien de bon, je me suis réfugiée dans le déni : Jasper rencontre encore une de ses malencontreuses aventures, il est dans une posture fâcheuse mais cela va s’arranger, forcément …
Sauf qu’il y avait ces Bip … Bip … réguliers, qui ne peuvent signifier qu’une chose …
Mais alors si Jasper a eu un accident de moto … qu’est devenue Ombe ? Est-elle …. ?
Oh non …..
"Je m’assieds dans le lit et je cherche des bras cet homme qui vient de perdre un Agent. Non, plus qu’un Agent, je l’ai lu sans ses yeux : une enfant.
Walter nous a toujours considérés, tous, comme ses petits.
Il me prend contre lui, avec une tendresse inattendue, et je laisse les larmes m’envahir.
Mon chagrin me submerge.
Je hoquette, je sanglote dans ses bras.
Il ne dit rien.
Il sait lui aussi qu’il n’y a rien à dire."
Et là débute alors le livre le plus triste, le plus dramatique de toute la série des A comme association.
Exit les traits d’humour de Jasper, exit ses blagues, ses jeux de mots …. C’est un Jasper meurtri, désemparé, épuisé mais animé d’un seul désir : venger celle dont il était parvenu le temps d’un rêve à se faire une amie ….
Je me sentie triste tout au long de ma lecture car au-delà de la perte d’Ombe …. c’est celle de Pierre Bottero, disparu peu avant dans un accident de moto (son héroïne était une férue de moto et son dernier livre se conclue sur une virée avec ce véhicule … coup du destin ?), que l’on pleure aussi.
Comme chaque auteur avait créé son propre personnage, la disparition de l’un allait entraîner celle de son héros aussi .. mais j’avoue que cela a été difficile à supporter.
C’est le roman le plus long de la série …. Près de 200 pages que j’ai lues dans un état étrange …. 200 pages qui sont comme suspendues dans un autre temps, bien que Jasper se démène pour trouver celui qui a commis l’irréparable, on a la sensation qu’il piétine, englué dans son désespoir.
Le rythme est très lent, le procédé de récit a changé … sur les quatre livres précédents, tout était axé sur Jasper ou Ombe. Là les personnages secondaires comme Mademoiselle Rose et Walter prennent une grande importance et surtout pour la première fois, la caméra se tourne vers eux, on assiste plusieurs fois à des dialogues alors que Jasper n’est pas auprès d’eux. Pour la première fois, on sait aussi ce qu’ils ressentent, comment ils vivent les évènements comme si Erik L’Homme avait eu besoin de les associer aussi à la tristesse de son personnage, tant celle si est terrible à supporter.
Du coup la série y gagne beaucoup, il est toujours intéressant de décentrer le récit du personnage principal.
Il peut arriver certes que l’on mette fin prématurément à un personnage important d’une histoire, ce n’est pas forcément courant mais cela arrive, G R.R. Martin en est le parfait exemple, mais dans ce cas c’est un peu différent.
Je pense qu’à travers la mort d’Ombe, vécue par Jasper, Erik L’Homme a fait de son roman une sorte d’exutoire …. Son personnage en devient son double : parfait reflet de son propre chagrin et de son propre deuil de la disparition de son ami Pierre Bottero. Et le roman en gagne en intensité, j’ai eu vraiment la sensation à chaque instant que l’auteur et son héros ne faisaient qu’un.
Et il en est resté une sorte de tristesse à l’état latent tout au long du livre.
Difficile de juger de la qualité d’un livre lorsqu’on est dans cet état à sa lecture et pourtant pour moi Là où les mots n’existent pas est un formidable hommage rendu à Pierre Bottero par son ami et associé Erik L’Homme. Un livre poignant et formidablement bien écrit, car il n'est pas facile de décrire l'affliction sans tomber dans le larmoiement.
Je me demande comment aurait évolué la série sans la disparition de Bottero : les relations entre Jasper et Ombe, leur enquête commune …. On ne le saura jamais hélas.
Par contre j’ai été vraiment séduite par la façon pudique et courageuse dont L’Homme a mené son récit malgré la perte et son propre deuil, ce qui fait que je continuerai à vouloir découvrir ses suites.
Surtout qu’en plus le mystère s’est épaissi durant ce tome et que j’ai hâte de savoir qui en veut à ce point à nos deux protagonistes … enfin en définitive à Jasper maintenant ….
Pour toutes ces raisons, je place ce livre dans mes coups de coeur de l'année.
De leurs réflexions, angoisses et délires, j’ai tiré mes conclusions personnelles. Notamment celle-ci : qu’on rejoigne le néant, un monde pire ou meilleur, des terres blanches ou noires, on disparaît pour toujours du regard des vivants.
La mort est un effacement. Une désintégration de l’être.
On peut spéculer sur l’âme et les arrières-mondes, n’empêche que, comme dit le poète, ce sont ceux qui restent qui se retrouvent en enfer …
On les retrouve au même instant … Jasper cramponné des deux bras autour de la taille de son amie … sa sœur telle qu’il l’a appelée … savourant ce moment magique …
Quand soudain ….
"L’obscurité.
L’obscurité et le silence.
Bip.
Je suis sur le dos, les bras en croix, le regard perdu dans les ténèbres. Je ne parviens pas à bouger. Je suis sur le dos et quelque chose m’écrase, de lourd, d’épais, de noir. Comme du goudron. J’ai du mal à respirer.
Bip."
Sur le coup je l’avoue, malgré la quatrième de couverture qui n'annonçait rien de bon, je me suis réfugiée dans le déni : Jasper rencontre encore une de ses malencontreuses aventures, il est dans une posture fâcheuse mais cela va s’arranger, forcément …
Sauf qu’il y avait ces Bip … Bip … réguliers, qui ne peuvent signifier qu’une chose …
Mais alors si Jasper a eu un accident de moto … qu’est devenue Ombe ? Est-elle …. ?
Oh non …..
"Je m’assieds dans le lit et je cherche des bras cet homme qui vient de perdre un Agent. Non, plus qu’un Agent, je l’ai lu sans ses yeux : une enfant.
Walter nous a toujours considérés, tous, comme ses petits.
Il me prend contre lui, avec une tendresse inattendue, et je laisse les larmes m’envahir.
Mon chagrin me submerge.
Je hoquette, je sanglote dans ses bras.
Il ne dit rien.
Il sait lui aussi qu’il n’y a rien à dire."
Et là débute alors le livre le plus triste, le plus dramatique de toute la série des A comme association.
Exit les traits d’humour de Jasper, exit ses blagues, ses jeux de mots …. C’est un Jasper meurtri, désemparé, épuisé mais animé d’un seul désir : venger celle dont il était parvenu le temps d’un rêve à se faire une amie ….
Je me sentie triste tout au long de ma lecture car au-delà de la perte d’Ombe …. c’est celle de Pierre Bottero, disparu peu avant dans un accident de moto (son héroïne était une férue de moto et son dernier livre se conclue sur une virée avec ce véhicule … coup du destin ?), que l’on pleure aussi.
Comme chaque auteur avait créé son propre personnage, la disparition de l’un allait entraîner celle de son héros aussi .. mais j’avoue que cela a été difficile à supporter.
C’est le roman le plus long de la série …. Près de 200 pages que j’ai lues dans un état étrange …. 200 pages qui sont comme suspendues dans un autre temps, bien que Jasper se démène pour trouver celui qui a commis l’irréparable, on a la sensation qu’il piétine, englué dans son désespoir.
Le rythme est très lent, le procédé de récit a changé … sur les quatre livres précédents, tout était axé sur Jasper ou Ombe. Là les personnages secondaires comme Mademoiselle Rose et Walter prennent une grande importance et surtout pour la première fois, la caméra se tourne vers eux, on assiste plusieurs fois à des dialogues alors que Jasper n’est pas auprès d’eux. Pour la première fois, on sait aussi ce qu’ils ressentent, comment ils vivent les évènements comme si Erik L’Homme avait eu besoin de les associer aussi à la tristesse de son personnage, tant celle si est terrible à supporter.
Du coup la série y gagne beaucoup, il est toujours intéressant de décentrer le récit du personnage principal.
Il peut arriver certes que l’on mette fin prématurément à un personnage important d’une histoire, ce n’est pas forcément courant mais cela arrive, G R.R. Martin en est le parfait exemple, mais dans ce cas c’est un peu différent.
Je pense qu’à travers la mort d’Ombe, vécue par Jasper, Erik L’Homme a fait de son roman une sorte d’exutoire …. Son personnage en devient son double : parfait reflet de son propre chagrin et de son propre deuil de la disparition de son ami Pierre Bottero. Et le roman en gagne en intensité, j’ai eu vraiment la sensation à chaque instant que l’auteur et son héros ne faisaient qu’un.
Et il en est resté une sorte de tristesse à l’état latent tout au long du livre.
Difficile de juger de la qualité d’un livre lorsqu’on est dans cet état à sa lecture et pourtant pour moi Là où les mots n’existent pas est un formidable hommage rendu à Pierre Bottero par son ami et associé Erik L’Homme. Un livre poignant et formidablement bien écrit, car il n'est pas facile de décrire l'affliction sans tomber dans le larmoiement.
Je me demande comment aurait évolué la série sans la disparition de Bottero : les relations entre Jasper et Ombe, leur enquête commune …. On ne le saura jamais hélas.
Par contre j’ai été vraiment séduite par la façon pudique et courageuse dont L’Homme a mené son récit malgré la perte et son propre deuil, ce qui fait que je continuerai à vouloir découvrir ses suites.
Surtout qu’en plus le mystère s’est épaissi durant ce tome et que j’ai hâte de savoir qui en veut à ce point à nos deux protagonistes … enfin en définitive à Jasper maintenant ….
Pour toutes ces raisons, je place ce livre dans mes coups de coeur de l'année.
Extraits
Je me souviens de notre première rencontre, Ombe. C’était pendant le séminaire de rentrée, au 13 rue du Horla, dans la bibliothèque. Walter en personne nous faisait un topo sur l’Association, définissant ses moyens et ses objectifs. Je m’étais pris les pieds dans le sac d’un abruti de stagiaire et je m’étais raccroché à toi. Tu m’avais redressé aussitôt, vigoureusement mais sans brutalité. Le regard que tu m’avais jeté, tandis que je bafouillais une excuse, était expressif. Un mélange d’intérêt et d’agacement. Je crois que c’est ce que j’ai toujours lu dans le bleu profond de tes yeux lorsqu’ils se posaient sur moi …De leurs réflexions, angoisses et délires, j’ai tiré mes conclusions personnelles. Notamment celle-ci : qu’on rejoigne le néant, un monde pire ou meilleur, des terres blanches ou noires, on disparaît pour toujours du regard des vivants.
La mort est un effacement. Une désintégration de l’être.
On peut spéculer sur l’âme et les arrières-mondes, n’empêche que, comme dit le poète, ce sont ceux qui restent qui se retrouvent en enfer …
Pour en savoir plus
Une interview de l'auteur, c'est ici.Ailleurs
Chez Snow ; Lalou ... et encore voir chez Livraddict.
Je n'ai pas encore lu ce volume mais j'ai lu la 4ème de couv' et le début de ton billet me conforte dans ce que je pensais... Pouvait-il en être autrement?
RépondreSupprimerNon je ne le pense pas ... cela dit c'est terrible quand même, j'ai hâte que tu me donnes ton avis sur ce tome là, c'est le genre de livre dont on a fortement envie de partager ses sensations tellement c'est fort.
RépondreSupprimerJ'ai terminé ce soir ce tome ci, et je suis dépitée.
RépondreSupprimerJe pensais sincèrement que L'Homme allait refaire vivre Ombe, et que l'on suivrait alors les aventures de Jasper et Ombe ensemble. Je te raconte pas mon état d'esprit durant tout le livre quand j'ai compris que ça n'allait pas du tout être ça.
Bref, je vais du mal à pondre mon article sur ce livre, ça tu peux me croire. Fiou, je sens que je vais bien cogiter en essayant de m'endormir, en repensant à ma lecture.