jeudi 30 juin 2011

Le K de Dino Buzzati

J'avais découvert le K durant mon année de seconde ... j'ai gardé un souvenir assez vif de certaines de ses nouvelles, sans me rappeler pour autant la façon dont je les avais perçues à l'époque.
Ce qui est certain c'est que quelques unes d'entre elles ont éveillé en moi des émotions qui prouvent qu'elles m'avaient déjà marquée à l'époque.

Le K en premier lieu c'est l'histoire d'un squale géant qui poursuit inlassablement un homme durant toute sa vie .... jusqu'à la chute finale que je ne raconterai pas là sous peine de trop en révéler.

C'est aussi le titre du recueil de nouvelles qui aborde plusieurs thèmes comme celui de la vieillesse, de la mort et du temps qui passe ; ou de l'amour, l'amour cruel ou fou, l'amour qui conduit à la tristesse, à l'abandon et à la solitude ; ou le thème de la religion ou de la guerre, vécue comme quelque chose d'inutile au final ; ou encore le thème de l'enfance et toute sa cruauté ; ou enfin le thème de l'art en général ou de l'écrivain en particulier dans lequel Buzzati se met souvent en scène, livrant ses doutes et ses croyances ...

A travers tous ces thèmes, Buzzati, de manière souvent pessimiste, quelquefois cruellement ou avec humour, avec un style formidable, excellemment écrit, nous invite à réfléchir sur les thèmes de la vie et de la mort, à nous remettre en question, voir à nous enseigner une certaine morale.
Son recueil écrit en 1966 montre bien les préoccupations de l'époque, les guerres mondiales, les dictatures mais aussi les soucis de l'époque, la façon de traiter les vieux ou la solitude de certaines personnes, ou encore l'oubli des morts.

J'ai particulièrement apprécié les nouvelles suivantes
- Le K bien entendu parce que sa chute est vraiment fantastique, que tout du long on croit que le poisson monstrueux va dévorer Stefano, que l'angoisse nous prend de voir son sinistre mufle dans le sillage de l'homme pour finalement .... allez lire cela vaut le coup !
- La leçon de 1980 : une belle façon de arrêter les conflits tout en se demandant si celle ci serait toujours suffisante pour empêcher les personnes d'accéder au pouvoir et à la toute puissance ?
- La création qui présente avec beaucoup d'humour l'arrivée d'un "animal dont l'aspect était vraiment désagréable, pour ne pas dire répugnant ..." l'homme qui est présenté comme un dangereux caprice à introduire sur Terre.
- Douce nuit : une nouvelle que j'ai beaucoup appréciée par son contraste entre un jardin calme, paisible et le côté terrifiant et barbare de la vie nocturne, d'une nature animale qui se dévore, se déchiquète, se poursuit impitoyablement.
- Suicide au parc, une nouvelle originale qui montre l'intérêt de certains hommes pour des femmes plus jeunes, se désintéressant avec de leur propre femme vieillissante ... le tout symbolisé par une voiture, c'est bien construit et la fin est assez terrible aussi.
- La Tour Eiffel : il y a quelque chose de l'ordre du magique dans cette nouvelle, ces hommes qui défient les lois de l'apesanteur pour grimper, grimper, grimper toujours plus haut, toucher les étoiles, comme un rêve ... qui finit par se briser.

Quelques nouvelles m'auront particulièrement marquée
- Le chien vide : c'est tellement bien écrit que j'ai eu l'impression d'être dans la peau de Nora et de ressentir ce qu'elle réalisait, lorsqu'elle se rend compte que malgré l'affection de son chien, elle est seule, désespérément seule .. une nouvelle très triste qui m'a beaucoup touchée.
- L'Entraïmpelung dans laquelle on jette les vieux à la rue comme les hétérogènes. Une nouvelle très dure à supporter qui m'a rappelé une scène terrible dans le film Le Pianiste de Roman Polanski : les nazis jettent un vieil homme depuis son fauteuil roulant, par la fenêtre, l'acte en lui même étant moins terrible que le détachement et le manque d'émotions qui y sont attachés, j'en frissonne encore !
- Pauvre petit garçon, cette nouvelle faisait partie de celle m'ayant particulièrement marquée durant mon adolescence ... évidement la chute n'a pas eu l'effet de surprise de la première fois mais amène à se poser des questions sur les liens entre une enfance difficile et le comportement de folie d'un homme, ou le fait qu'une telle enfance peut-elle expliquer voire excuser une partie des déviances d'un dictateur ? Cet enfant- là, élevé autrement, aimé différemment, aurait-il conduit les mêmes actes ?

En conclusion je suis vraiment contente que ce livre ait été choisi comme lecture commune du Cercle d'Atuan, cela m'aura permis de re découvrir ce recueil d'une très grande qualité littéraire.
Je n'ai pas aimé toutes les nouvelles mais elles sont variées et non lassantes, abordant beaucoup de sujets qui touchent de manière diverse selon sa personnalité ou son état d'esprit.
Un livre qui mérite vraiment d'être découvert !

Extrait
"Jusqu'au moment où la nuit, qui s'était approchée à pas de silencieux, s'abattit de tout son corps immense de ténèbres sur la ville et s'y appesantit, et les heures commencèrent leur galop impitoyable qui nous dévore, nous autres pauvres créatures sans défense."

Les avis des bloggeurs du Cercle
Tigger Lilly ; Lelf ; mass ; Sherryn ; Vert ; Julien ; Thom ; Olya ; Shaya ; Maëlig ...

3 commentaires:

  1. Bon, j'ai déjà un peu plus envie après avoir lu ça. On verra si le livre se précipite dans mes mains la prochaine fois que je passe dedans!

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  2. Tu as fait un bien meilleur compte-rendu que le mien, je suis incapable de parler des bouquins quand ce sont des "classiques". Mais en tout cas, même si certaines nouvelles font un peu leur âge, certaines restent très actuelles finalement ^^

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  3. @Cachou, oui tu me diras s'il te saute dans les mains xD

    @Vert, merci beaucoup ^^ Je trouve aussi que même datant des années 60, ce livre ne dépareille pas avec notre triste actualité.

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