"Et puis, je trouve, à mon sens, qu'un bon livre est un peu comme un coup de pied dans le ventre, ça coupe le souffle et on s'en redresse avec les joues rouges et les larmes aux yeux."
Après la lecture de son tout premier roman, je voulais bien reprendre un autre coup de pied tant la puissance de son récit m'avait charmée ...
Je regrette juste ne pas avoir relu ou re parcouru rapidement Chien du Heaume avant d'attaquer Mordre le bouclier, on a beau rédiger des billets pour entretenir un peu la mémoire, on oublie quand même un tantinet ... résultat on a toujours la sensation de plonger dans l'inconnu avant que la mémoire se réveille et qu'on accède à quelques souvenirs qui permettent d'éclairer sa lecture.
Cela ne me fait pas forcément cela avec tous les romans que je lis, par exemple avec le Trône de Fer de Martin (oui je sais, je le cite souvent mais quand on aime ..) j'ai toujours replongé immédiatement dans le récit même après un sevrage de plusieurs semaines ...
Bref .. on retrouve donc Chien du Heaume six mois après ... Mutilée, anéantie par la perte de ses doigts, elle sombre peu à peu dans une mélancolie dans le castel de Broe ... jusqu'à l'arrivée de Bréhyr qui, pour la sortir de sa torpeur, l'emmène à sa suite sur les routes à la recherche du dernier homme dont elle doit venger son enlèvement lorsqu'elle était petite et la mort de son père. Parti en Terre Sainte, celui ci doit repasser par le tor, une tour mythique hantée par des fantômes
"Il y eut un bruit, un seul ; celui d'une chose raclée au sol, tirée contre la pierre, et Chien releva brusquement la têt. Une longue brume couvrait la salle, blanche et translucide. Elle bouclait comme la fumée forte d'une bougie, avec , en frange sur le dessus, de ces tourbillons mouvants qui montent des brouillards au fond des vallons. Et dans cette matière cotonneuse, Chien perçut des mouvements ; peu, lents, mais une présence se montrait."
Les romans de Justine Niogret n'ont rien de semblable à ces romans chevaleresques du Moyen Age avec leurs héros bien proprets, romantiques, presque lisses .... on est là dans du brut de brut, le Moyen Age barbare, sale, noir ... ce Moyen Age où l'on épand les champs avec la merde que laissent les croisés mais dans une telle mesure que le sol en dégorge et ne peut tout digérer ... où l'ont trouve des fosses emplies de cadavres d'enfants gonflés dont la main flotte à la surface de l'eau et de la boue ... où l'on tue avec violence et souffrance ....
Le style de Niogret reste tranchant, allant au fond des choses, de façon crue, certaines scènes de mise à mort m'ont mises très mal à l'aise (un peu de similarité avec le début de Dehors les chiens les infidèles, de Mazaurette qui ouvrait le bal avec une scène de tortue insupportable) ... mais avec une écriture qui reste forte, poétique, belle ....
Et les personnages ... ces femmes meurtries jusqu'au fond de leurs âmes, qui cherchent vengeance et réparation, qui se cherchent surtout, chacune à sa manière, dans sa propre colère ... une colère violente et dévastatrice pour Chien du Heaume, une violence froide mais tout aussi impitoyable pour Bréhyr .... Des femmes de guerre en contrepartie avec l'homme qu'elles vont rencontrer, Saint Roses, un chevalier à la beauté irréelle, qui a perdu sa foi comme sa jambe au cours de sa croisade mais qui en a gagné une humanité et une douceur dont elles semblent dépourvues .... Pourtant Chien et Bréhyr sont touchantes à leur manière malgré tout dans le long cheminement de leur Moi ...
Ce n'est pas tant le chemin des croisés qui fait la trame de ce récit que leur propre histoire, leur propre chemin .... Un roman très psychologique.
Un chemin difficile qui les met leurs sentiments à nu .... mais à leur façon chacune tend à retrouver un apaisement ce qui donne une certaine luminosité à ce roman qui au premier abord parait fort noir.
J'ai moins aimé cependant cette lecture que le premier opus qui m'avait vraiment emballée mais la qualité est toujours présente et j'ai tout de même lu avec beaucoup de plaisir. Je pense que j'ai un peu moins apprécié à cause de la souffrance très présente et palpable des personnages tout au long du récit, on a envie que cela cesse, qu'elles retrouvent la paix et la sérénité .... et aussi par les scènes trop crues de violence.
A découvrir à la fin du livre : le petit lexique des étrangers aux armes, armures et pièces d'équipements médiévaux, rédigé par Justine Niogret elle-même, avec beaucoup d'humour voire même des éclats de rire ... et une magnifique postface de Jean Philippe Jaworski qui apporte un éclairage très intéressant au roman., en particulier sur sa situation historique, qui le placerait au moment de la toute première croisade c'est à dire dans les années 1095.
Extraits
"Cette nuit-là, Chien du heaume dormit comme on se noie. Elle rêva de sang, et de hurlements. Quelque part, il y avait les siens."
"Les livres redonnent une langue aux empereurs et aux morts, Chien. Ils sont .. des bulles au creux des vitres ; le temps passe et elles demeurent là, et son on brise le verre, l'air qui s'en échappe vient pourtant d'un hiver passé. Comme ces gouttes d'ambre que l'on trouve dans le Nord, de ces perles de sang d'ours, de ces pierres de frères de la forêt. Dedans restent parfois des insectes, des feuilles, pris dans une matière qui les coupe du temps. Les livres sont ainsi, on les ouvre et en monte un parfum passé et ancien, non pas de poussière et d'ennui mais de sagesse et d'héroïsme."
Cette lecture était prévue en commun avec Lhisbei ; Lorkhan , Shaya et Efelle ... je l'ai au final faite en décalage.
Après la lecture de son tout premier roman, je voulais bien reprendre un autre coup de pied tant la puissance de son récit m'avait charmée ...
Je regrette juste ne pas avoir relu ou re parcouru rapidement Chien du Heaume avant d'attaquer Mordre le bouclier, on a beau rédiger des billets pour entretenir un peu la mémoire, on oublie quand même un tantinet ... résultat on a toujours la sensation de plonger dans l'inconnu avant que la mémoire se réveille et qu'on accède à quelques souvenirs qui permettent d'éclairer sa lecture.
Cela ne me fait pas forcément cela avec tous les romans que je lis, par exemple avec le Trône de Fer de Martin (oui je sais, je le cite souvent mais quand on aime ..) j'ai toujours replongé immédiatement dans le récit même après un sevrage de plusieurs semaines ...
Bref .. on retrouve donc Chien du Heaume six mois après ... Mutilée, anéantie par la perte de ses doigts, elle sombre peu à peu dans une mélancolie dans le castel de Broe ... jusqu'à l'arrivée de Bréhyr qui, pour la sortir de sa torpeur, l'emmène à sa suite sur les routes à la recherche du dernier homme dont elle doit venger son enlèvement lorsqu'elle était petite et la mort de son père. Parti en Terre Sainte, celui ci doit repasser par le tor, une tour mythique hantée par des fantômes
"Il y eut un bruit, un seul ; celui d'une chose raclée au sol, tirée contre la pierre, et Chien releva brusquement la têt. Une longue brume couvrait la salle, blanche et translucide. Elle bouclait comme la fumée forte d'une bougie, avec , en frange sur le dessus, de ces tourbillons mouvants qui montent des brouillards au fond des vallons. Et dans cette matière cotonneuse, Chien perçut des mouvements ; peu, lents, mais une présence se montrait."
Les romans de Justine Niogret n'ont rien de semblable à ces romans chevaleresques du Moyen Age avec leurs héros bien proprets, romantiques, presque lisses .... on est là dans du brut de brut, le Moyen Age barbare, sale, noir ... ce Moyen Age où l'on épand les champs avec la merde que laissent les croisés mais dans une telle mesure que le sol en dégorge et ne peut tout digérer ... où l'ont trouve des fosses emplies de cadavres d'enfants gonflés dont la main flotte à la surface de l'eau et de la boue ... où l'on tue avec violence et souffrance ....
Le style de Niogret reste tranchant, allant au fond des choses, de façon crue, certaines scènes de mise à mort m'ont mises très mal à l'aise (un peu de similarité avec le début de Dehors les chiens les infidèles, de Mazaurette qui ouvrait le bal avec une scène de tortue insupportable) ... mais avec une écriture qui reste forte, poétique, belle ....
Et les personnages ... ces femmes meurtries jusqu'au fond de leurs âmes, qui cherchent vengeance et réparation, qui se cherchent surtout, chacune à sa manière, dans sa propre colère ... une colère violente et dévastatrice pour Chien du Heaume, une violence froide mais tout aussi impitoyable pour Bréhyr .... Des femmes de guerre en contrepartie avec l'homme qu'elles vont rencontrer, Saint Roses, un chevalier à la beauté irréelle, qui a perdu sa foi comme sa jambe au cours de sa croisade mais qui en a gagné une humanité et une douceur dont elles semblent dépourvues .... Pourtant Chien et Bréhyr sont touchantes à leur manière malgré tout dans le long cheminement de leur Moi ...
Ce n'est pas tant le chemin des croisés qui fait la trame de ce récit que leur propre histoire, leur propre chemin .... Un roman très psychologique.
Un chemin difficile qui les met leurs sentiments à nu .... mais à leur façon chacune tend à retrouver un apaisement ce qui donne une certaine luminosité à ce roman qui au premier abord parait fort noir.
J'ai moins aimé cependant cette lecture que le premier opus qui m'avait vraiment emballée mais la qualité est toujours présente et j'ai tout de même lu avec beaucoup de plaisir. Je pense que j'ai un peu moins apprécié à cause de la souffrance très présente et palpable des personnages tout au long du récit, on a envie que cela cesse, qu'elles retrouvent la paix et la sérénité .... et aussi par les scènes trop crues de violence.
A découvrir à la fin du livre : le petit lexique des étrangers aux armes, armures et pièces d'équipements médiévaux, rédigé par Justine Niogret elle-même, avec beaucoup d'humour voire même des éclats de rire ... et une magnifique postface de Jean Philippe Jaworski qui apporte un éclairage très intéressant au roman., en particulier sur sa situation historique, qui le placerait au moment de la toute première croisade c'est à dire dans les années 1095.
Extraits
"Cette nuit-là, Chien du heaume dormit comme on se noie. Elle rêva de sang, et de hurlements. Quelque part, il y avait les siens."
"Les livres redonnent une langue aux empereurs et aux morts, Chien. Ils sont .. des bulles au creux des vitres ; le temps passe et elles demeurent là, et son on brise le verre, l'air qui s'en échappe vient pourtant d'un hiver passé. Comme ces gouttes d'ambre que l'on trouve dans le Nord, de ces perles de sang d'ours, de ces pierres de frères de la forêt. Dedans restent parfois des insectes, des feuilles, pris dans une matière qui les coupe du temps. Les livres sont ainsi, on les ouvre et en monte un parfum passé et ancien, non pas de poussière et d'ennui mais de sagesse et d'héroïsme."
Cette lecture était prévue en commun avec Lhisbei ; Lorkhan , Shaya et Efelle ... je l'ai au final faite en décalage.
Ailleurs
Scifi Universe ; BlackWolff ...
J'ai eu l'impression que le récit tournait un peu en rond quand même.
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