Dans cette uchronie de Dick, datant de 1962, les Alliés ont capitulé devant les forces de l'Axe et les Etats Unis ont été divisés en deux (on pense forcément aux deux Allemagne de la réalité de l'après 1945), l'est du pays est désormais sous la coupelle des allemands tandis que l'ouest a été attribué aux japonais ...
Quelques années plus tard, la vie a repris son cours ... les allemands visent la conquête du ciel, après avoir totalement anéanti l'Afrique, les japonais tiennent leur domination de façon passive mais froide.
C'est un livre très étrange, dans une ambiance feutrée dans laquelle les personnages évoluent lentement, en restant accès sur leurs ressentis et surtout ceux de leurs interlocuteurs, des autres personnes qu'ils vont être amenés à croiser .... Ils se posent sans cesse des questions sur leurs actes et ceux des autres, sur leurs façons de réagir, comme si toute spontanéité avait disparu avec la défaite .... J'ai eu vraiment la sensation qu'ils marchaient en permanence sur des oeufs tout au long de l'histoire.
Il faut dire que le récit de Dick est lent, très lent, comme posé lui aussi, dans une attente que quelque chose bouge, arrive, se passe ... On se sent presque hypnotisé en le lisant.
Au delà des personnages, deux livres ... tout aussi importants en fin de compte que les protagonistes
- le Yi King ou Livre des transformations, le Cinquième Livre de la Sagesse divine, un livre vieux de 5 000 ans, qui permet à l'aide de baguettes de voir si le chemin emprunté est le bon ou pas.
Je ne peux m'empêcher de songer à cette citation de Bordage dans Ceux qui sauront : " Croire au destin c'est renoncer à sa liberté d'être humain." Fatalement les personnages de Dick s'en remettent sans cesse à ce livre et n'ont en fin de compte aucune prise sur leur avenir, on les sent comme déshumanisés.
Ce qui fait d'ailleurs l'écueil de ce roman, il est très difficile d'accrocher à ce genre de personnages, de ressentir de l'empathie pour eux ...
L'exemple le plus flagrant étant le commerçant Childan dont tous les actes sont dictés par ce que peuvent penser les autres "Les aspirations, les terreurs, les tourments de Robert Childan surgirent devant lui, vinrent le submerger, lui paralyser la langue. La main crispée sur le téléphone, il se mit à bégayer."
Mais les autres protagonistes aussi, Frank Frink qui se lance dans son propre commerce, son ex femme Juliana, qui suit un italien rencontré dans un bar et finalement découvre ce qu'il trame., Monsieur Tagomi un japonais qui traite avec Childan. .. tous utilisent le Yi King et en marquent leur chemin. C'est presque effrayant.
- La sauterelle pèse lourd, un ouvrage écrit par Abendsen et qui retrace un "et si les Alliés l'avaient emporté ?", livre bien entendu interdit et pourtant largement diffusé, livre qui guidera en fin de compte les actes de Juliana, lui donnant à nouveau libre arbitre de sa vie.
C'est ce qui fait l'originalité justement du roman de Dick, il a écrit une uchronie dans l'uchronie ... nous lecteurs découvrons ce qu'aurait été le monde sous la victoire des allemands tandis que les personnages-lecteurs du livre que nous avons entre les mains découvrent, eux, à travers un autre livre, ce qu'aurait été le monde si les Allemands avaient perdu.
Cela donne une vision double des choses très intéressante.
Dick porte d'ailleurs un regard sur la folie des allemands qui donne froid dans le dos (voir la deuxième citation ci dessous).
En résumé, Le Maitre du Haut Château est un incontournable du genre uchronique, je serais curieuse de découvrir d'autres ouvrages de cet auteur qui m'a l'air totalement atypique dans sa façon de narrer les évènements et surtout dans sa perception des personnages.
Néanmoins j'avoue que ma lecture a été empreinte d'une certaine indifférente envers les personnages, vraiment pas attachants (en dehors de Juliana qui se révèle la plus vivante de tous), j'ai parcouru le livre de la même façon que les protagonistes affrontaient leur monde, de manière feutrée et qui n'accroche pas .... A des moments j'ai trouvé les propos de Dick très confus. Je pense que si j'ai pu le lire en entier sans sourciller c'est que j'étais dans un état de détente qui me permettait d'aborder ce genre de roman difficile. (les vacances cela aide !!!).
Ce livre a reçu le Prix Hugo du meilleur roman en 1963.
Je l'ai lu dans le cadre du Challenge Winter Time Travel de Lhisbei.
Citation
"Cet Abendsen. Je ne lui reproche rien. Il écrit ce que lui dicte son imagination, il essaie de se représenter ce qu'aurait été le monde si l'Axe avait été battu. Comment cela aurait-il pu arriver si l'Italie n'avait pas trahi ?"
"Ils veulent être les moteurs de l'Histoire et non pas les victimes. Ils s'identifient à la puissance de Dieu et se croient ses égaux. C'est le fondement même de leur folie. Ils sont dominés par un archétype ; leur égo s'est développé d'une manière psychopathologique si bien qu'ils ne peuvent dire où il commence et où la divinité s'arrête. Ce n'est pas de l'orgueil ; c'est une hypertrophie de l'égo jusqu'à un point extrême - jusqu'à la confusion entre celui qui adore et celui qui est adoré. L'homme n'a pas mangé Dieu ; Dieu a mangé l'Homme."
Ailleurs
Benjamin ; Cachou ; Traqueur Stellaire ; Lhisbei ; Val ; XL ; Julien le Naufragé ; Phooka ;
Quelques années plus tard, la vie a repris son cours ... les allemands visent la conquête du ciel, après avoir totalement anéanti l'Afrique, les japonais tiennent leur domination de façon passive mais froide.
C'est un livre très étrange, dans une ambiance feutrée dans laquelle les personnages évoluent lentement, en restant accès sur leurs ressentis et surtout ceux de leurs interlocuteurs, des autres personnes qu'ils vont être amenés à croiser .... Ils se posent sans cesse des questions sur leurs actes et ceux des autres, sur leurs façons de réagir, comme si toute spontanéité avait disparu avec la défaite .... J'ai eu vraiment la sensation qu'ils marchaient en permanence sur des oeufs tout au long de l'histoire.
Il faut dire que le récit de Dick est lent, très lent, comme posé lui aussi, dans une attente que quelque chose bouge, arrive, se passe ... On se sent presque hypnotisé en le lisant.
Au delà des personnages, deux livres ... tout aussi importants en fin de compte que les protagonistes
- le Yi King ou Livre des transformations, le Cinquième Livre de la Sagesse divine, un livre vieux de 5 000 ans, qui permet à l'aide de baguettes de voir si le chemin emprunté est le bon ou pas.
Je ne peux m'empêcher de songer à cette citation de Bordage dans Ceux qui sauront : " Croire au destin c'est renoncer à sa liberté d'être humain." Fatalement les personnages de Dick s'en remettent sans cesse à ce livre et n'ont en fin de compte aucune prise sur leur avenir, on les sent comme déshumanisés.
Ce qui fait d'ailleurs l'écueil de ce roman, il est très difficile d'accrocher à ce genre de personnages, de ressentir de l'empathie pour eux ...
L'exemple le plus flagrant étant le commerçant Childan dont tous les actes sont dictés par ce que peuvent penser les autres "Les aspirations, les terreurs, les tourments de Robert Childan surgirent devant lui, vinrent le submerger, lui paralyser la langue. La main crispée sur le téléphone, il se mit à bégayer."
Mais les autres protagonistes aussi, Frank Frink qui se lance dans son propre commerce, son ex femme Juliana, qui suit un italien rencontré dans un bar et finalement découvre ce qu'il trame., Monsieur Tagomi un japonais qui traite avec Childan. .. tous utilisent le Yi King et en marquent leur chemin. C'est presque effrayant.
- La sauterelle pèse lourd, un ouvrage écrit par Abendsen et qui retrace un "et si les Alliés l'avaient emporté ?", livre bien entendu interdit et pourtant largement diffusé, livre qui guidera en fin de compte les actes de Juliana, lui donnant à nouveau libre arbitre de sa vie.
C'est ce qui fait l'originalité justement du roman de Dick, il a écrit une uchronie dans l'uchronie ... nous lecteurs découvrons ce qu'aurait été le monde sous la victoire des allemands tandis que les personnages-lecteurs du livre que nous avons entre les mains découvrent, eux, à travers un autre livre, ce qu'aurait été le monde si les Allemands avaient perdu.
Cela donne une vision double des choses très intéressante.
Dick porte d'ailleurs un regard sur la folie des allemands qui donne froid dans le dos (voir la deuxième citation ci dessous).
En résumé, Le Maitre du Haut Château est un incontournable du genre uchronique, je serais curieuse de découvrir d'autres ouvrages de cet auteur qui m'a l'air totalement atypique dans sa façon de narrer les évènements et surtout dans sa perception des personnages.
Néanmoins j'avoue que ma lecture a été empreinte d'une certaine indifférente envers les personnages, vraiment pas attachants (en dehors de Juliana qui se révèle la plus vivante de tous), j'ai parcouru le livre de la même façon que les protagonistes affrontaient leur monde, de manière feutrée et qui n'accroche pas .... A des moments j'ai trouvé les propos de Dick très confus. Je pense que si j'ai pu le lire en entier sans sourciller c'est que j'étais dans un état de détente qui me permettait d'aborder ce genre de roman difficile. (les vacances cela aide !!!).
Ce livre a reçu le Prix Hugo du meilleur roman en 1963.
Je l'ai lu dans le cadre du Challenge Winter Time Travel de Lhisbei.
Citation
"Cet Abendsen. Je ne lui reproche rien. Il écrit ce que lui dicte son imagination, il essaie de se représenter ce qu'aurait été le monde si l'Axe avait été battu. Comment cela aurait-il pu arriver si l'Italie n'avait pas trahi ?"
"Ils veulent être les moteurs de l'Histoire et non pas les victimes. Ils s'identifient à la puissance de Dieu et se croient ses égaux. C'est le fondement même de leur folie. Ils sont dominés par un archétype ; leur égo s'est développé d'une manière psychopathologique si bien qu'ils ne peuvent dire où il commence et où la divinité s'arrête. Ce n'est pas de l'orgueil ; c'est une hypertrophie de l'égo jusqu'à un point extrême - jusqu'à la confusion entre celui qui adore et celui qui est adoré. L'homme n'a pas mangé Dieu ; Dieu a mangé l'Homme."
Ailleurs
Benjamin ; Cachou ; Traqueur Stellaire ; Lhisbei ; Val ; XL ; Julien le Naufragé ; Phooka ;
Je lis ton avis un peu en diagonale vu que je le lirai dans les prochaines semaines (genre... avant la fin du défi)... mais comme les autres avis que j'ai pu lire, tu as quand même des bémols... J'ai hâte de voir ce que je vais en penser.
RépondreSupprimerLa fin du défi approche à grands pas, alors bonne lecture à toi ^^
RépondreSupprimerHâte de lire ton avis aussi :)
Ah j'ai vraiment eu du mal à aller au bout :)
RépondreSupprimerSeule l'uchronie dans l'uchronie m'a bien plu...le reste mouais. Ubik restera mon roman préféré de dick :)
Comme tu le décris si bien, les personnages ne sont pas attachants. De plus, j'ai trouvé le récit trop brouillon, je suis incapable de te raconter l'histoire ! Bref, j'ai pas trop aimé, mais d'autres récits de Dick sont trop forts. J'aime bien cet auteur déjanté paranoïaque pour ces idées de folies et ses personnages tous à moitié schizo... mais il n'est pas évident à lire (mon dernier en date, glissement de temps sur Mars, j'ai pas été au bout parce que ça virais dans l'horreur et je supporte pas ça. Il est doué pour les visions cauchemardesques "-_- ).
RépondreSupprimer